2020-2022 : une nouvelle séquence

Même si nous y étions déjà, l’annonce de la candidature de Jean-Luc Mélenchon nous fait, désormais, pleinement entrer dans la séquence électorale couvrant la période 2020-2022. Les élections départementales seront, sans doute, un peu en retrait, mais les régionales vont, elles, être un moment forts, juste avant la présidentielle. Une forme de test, et ce d’autant plus que, désormais, les régions recouvrent d’énormes territoires.

Luttes, élections, débouché politique

La façon de se déclarer, comme pour l’élection de 2017, montre en elle-même comment Jean-Luc Mélenchon conçoit la politique : sa propre rencontre avec le peuple. Celui-ci, pour masquer son isolement politique à gauche, s’en est remis à un tour de passe-passe, un appel à rassembler 150.000 signatures pour sa candidature. Il les a déjà atteintes, il va même, très certainement, en rassembler beaucoup d’autres. Mais cela n’empêche que cette démarche politique coupe le candidat insoumis de la grande majorité de ce qui structure le mouvement social.

En effet, comme tout le monde le sait, nous vivons dans un pays où le président, Emmanuel Macron, mêle des politiques antisociales et liberticides ; racistes et sexistes. Nous vivons, aussi, une crise sanitaire grave (liée à un nouveau virus dont l’apparition peut être imputée au capitalisme), durant laquelle les gouvernements Philippe et Castex ont fait passer les profits avant nos vies. Cette crise-là va marquer une génération mondiale toute entière puisque se mélangent une peur légitime du virus (et de la mort), à des mesures sécuritaires et anti-sociales avec, en contre-feu, des discours racistes et martiaux. Dans ce climat politique-là, les colères sont grandes. En 2019-2020, nous avons même connu une lutte de masse, longue, contre une nouvelle attaque contre le système de retraite par répartition. Et, chaque jour, nous pouvons constater, localement, des luttes contre des mauvaises conditions de travail, pour les salaires, contre les licenciements, dans l’éducation nationale, dans la santé, etc. Nous avons connu, aussi au printemps 2020, l’une des plus grandes luttes antiracistes suite à l’assassinat de George Floyd. Bref : il y a un terreau propice à l’émergence d’une force politique enracinée dans ces luttes-là.

Par ailleurs, un certain nombre de nouvelles expressions politiques ont déjà émergées des luttes. On peut notamment le voir dans les mouvements écologistes radicaux (Alternatiba, Extinction Rébellion, etc.), féministes (Femmes en Luttes) ou encore antiracistes (par exemple le comité Adama). En réalité, chaque groupe, y compris parfois local, est une forme d’organisation politique à elle seule, avec un champ de revendications qui dépasse largement le strict objet de la lutte. Souvent, même, ces groupes se définissent comme anticapitalistes et posent donc la question du pouvoir politique, d’en finir avec l’ordre établi. C’est pourquoi il est nécessaire de réfléchir différemment que l’homme politique (ou l’organisation politique) guide, qu’il faudrait suivre. Il y a un enjeu majeur à structurer, d’une façon ou d’une autre, ces luttes, ces expressions politiques, autour de pratiques militantes nouvelles mais surtout pour élaborer un idéal de société en commun.

Construire une alternative

La première chose à affirmer c’est que, le plus important dans la période 2020-2022, reste la construction de luttes de masse sur tous les sujets. C’est le seul moyen de gagner des droits, de faire reculer le pouvoir et, surtout, de faire vivre une démocratie directe. Il n’en demeure pas moins que, pour changer la société toute entière, pour la révolutionner, il y a besoin d’une organisation politique de masse, d’un plan d’action, d’un programme et d’un paradigme commun.

Contrairement à Jean-Luc Mélenchon, il faut affirmer qu’il y a un enjeu à rassembler les militantes et les militants, les groupes de luttes, les organisations anticapitalistes, d’abord et avant tout parce que la priorité, avant les élections, est la construction d’un cadre commun qui porte une alternative politique. Mais aussi parce qu’il faut le dire : le changement révolutionnaire de la société que nous voulons ne viendra pas des élections, cela se fera justement par un rejet massif des institutions bourgeoises.

Néanmoins, nous ne sommes pas dans une période révolutionnaire. Et il n’y a pas de force politique révolutionnaire qui postule sérieusement au pouvoir. C’est pourquoi il faut se poser la question d’une participation aux élections pour y défendre une orientation politique et y faire des démonstrations politiques.

A Bordeaux, lors des dernières municipales, la liste « Bordeaux en Luttes ! » a fait la démonstration qu’il est possible de rassembler, par en bas, des militantes et militants d’horizons différents, autour d’un programme de luttes. A Poitiers, aux municipales, le NPA a su s’ouvrir suffisamment pour permettre que vive une liste « 100% à gauche », qui rassemblait bien au-delà des rangs du NPA. Ces expériences ne sont pas seulement des coups politiques : il y a une continuité, après les élections, avec une participation accrue aux luttes, voire même des initiatives de luttes prises via ces regroupements nouveaux. Ce n’est pas parfait, mais cela montre qu’il est possible de connecter luttes et élections, et de maintenir des dynamiques hors-élections. Toutefois, dans la période, les élections restent une tribune importante.

Aussi, avec les régionales qui arrivent, il me paraît utile d’engager partout où cela est possible des rencontres entre militantEs pour construire des listes 100% à gauche, les plus larges possibles, sur des bases anticapitalistes. La perspective est de développer partout cette pratique militante, unitaire et radicale, pour montrer qu’il existe une alternative radicale, positive, porteuse d’espoir et révolutionnaire, à une candidature en solo.

Tout cela est possible si l’on s’en donne les moyens. Les anticapitalistes ont tout à gagner à mettre leurs forces dans ce genre de perspective unifiante, permettant de faire vivre un autre possible.

Pour aller dans ce sens, retrouvez, pour celles et ceux qui ont facebook, la page « 150.000 pour une candidature anticapitaliste unitaire en 2022 ». C’est une façon de montrer qu’autre chose existe, pas en « contre », mais en « mieux ».

Alexandre Raguet

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