Zemmour lance sa campagne chez Praud ?

Ce lundi 13 septembre, Pascal Praud accueillait dans son émission « L’heure des Pros » diffusée sur C-News, le possible candidat d’extrême-droite à la présidentielle, Eric Zemmour.

L’émission a commencé sur une information, c’est la fin de sa participation à « Face à l’info », dont il était la vedette tous les jours sur la même chaîne C-News, et où il distillait ses idées d’extrême-droite. En effet, comme il ne fait plus vraiment de secret qu’il est candidat à la présidentielle (on sait qu’il cherche des parrainages de maires), le CSA a décidé de décompter son temps de parole et donc de limiter ses apparitions. Mais quelque part, le plateau de ce lundi matin avait quelque chose de particulier : tête-à-tête entre Praud et Zemmour, ton détendu, discussion sur le tempérament « trop loyal », pas assez « chef » du candidat… Zemmour qui pâtit d’un manque de charisme et de stature présidentielle cherche à prouver sa légitimité : sur la forme il a des défauts, mais sur le fond, lui, il ne va pas trahir comme Sarkozy cité en contre-exemple. Ne s’agit-il pas-là d’un lancement de campagne ?

Praud, s’il fait mine de ne pas croire en un Zemmour président, cherche par tous les moyens à le grandir. D’abord en en faisant un martyr, le mot « diable » revient à plusieurs reprises. Il reprend les exemples de quelques émissions où des journalistes ont critiqué le discours raciste, voire fasciste, que Zemmour répend. L’avocat Praud joue son rôle à merveille : quand Zemmour tente de se dépatouiller pour expliquer qu’il n’est pas anti-républicain, il lui laisse toute latitude pour expliquer qu’il l’est plus que les autres en se référant à une vision raciste et autoritaire de la république, qui a bien existé mais qui est plus liée à la nation qu’à la démocratie. Il y a effectivement plusieurs façons d’être républicains, c’est pourquoi cette référence n’est pas bonne et, même, on peut dire qu’elle est devenue une valeur de droite : https://blogs.mediapart.fr/alexandre-raguet/blog/211020/quand-les-valeurs-republicaines-deviennent-des-valeurs-nationalistes

Bref, Eric Zemmour, le pauvre, est victime de toutes parts de critiques. Il est même en quelque sorte censuré, même s’il est à la télé tous les jours depuis 2 ans. Après des critiques des médias, des critiques de l’État de droit, le terrain est placé pour commencer à lancer sa diatribe contre les musulmans et les femmes.

Nous voilà donc lancé, juste avant une coupure publicitaire, sur la question des musulmans. Praud reproche à Zemmour de généraliser. Celui-ci se défend en disant qu’il y a des masses qui agissent et qu’il faut les voir comme telles.

En l’espace de quelques minutes, je décompte l’usage de mots : islam 5 fois, musulmans 4 fois, français 3 fois, charia 3 fois. Alors que jusqu’à maintenant il était détendu, nous voyons-là l’islamophobie du personnage surgir et casser son image sereine. Il bouge, s’agace, ne parvient plus à cacher ce mal qui le hante : le racisme. Même Praud tente de lui dire que oui, il y a un problème avec « l’islamisme » (sic!), mais pas avec les musulmans. Cela ne convainc pas Zemmour qui sort des chiffres faux : un jeune musulman sur deux ferait passer la charia avant la république. Ah bon, quand, où ? Une fois de plus, Zemmour ment et la caravane passe.

Retour à l’antenne, c’est reparti sur une critique du service public qui déteste le pauvre Zemmour. Et comme nous ne sommes pas à une contradiction près, voici la théorie nouvelle : Zemmour se bat contre l’idéologie dominante mais son idéologie est dominante dans la société. CQFD. Mais assez critiqué les journalistes, voici une critique de Pécresse (on ne va pas pleurer!), mais c’est seulement une façon d’aborder le « problème » (pour lui) de la féminisation de la société. Il affirme être « contre-féministe ». En grand prince, Zemmour est d’accord pour que les femmes puissent travailler. Mais, parce qu’il y a un mais, Zemmour rappelle qu’il est fou de s’en prendre à lui comme sexiste car la vraie menace, elle vient des musulmans, de la république islamique qui vient, de la charia ! Et on y revient ! Quoi que, non, Praud reprend la main et lui demande les différences entre femmes et hommes. La féminisation de la société, donc, a détruit la notion d’autorité des sociétés, il faut alors revenir à une version plus viriliste de la société. C’est difficile de défendre plus clairement le patriarcat.

Je fais une petite pause moi aussi.

Je reviens. J’ai du raté pas mal de mots « islam », « islamisation », j’ai même entendu « grand remplacement ». Praud pause la question : « combien de musulmans en France, 7, 8 millions ? Que faire ? ». Pour Zemmour, il faut ramener la paix. Juste avant il comparait les quartiers français avec le Kosovo. Praud redit qu’il ne faut pas généraliser. Zemmour répond que les minorités font l’histoire, 20 minutes plus tôt c’était les masses. Revenons-en au SUJET de Zemmour : il faut absolument renvoyer les illégaux chez eux, il faut la déchéance de nationalité, il faut de la sanction, des flics, des militaires. Petite critique de la justice au passage, ça manquait, ces juges qui seraient trop sujet à la culture de l’excuse et à la complaisance. L’émission devient vraiment insupportable. Interdire le regroupement familial, limiter les étudiants étrangers, revoir largement le droit d’asile et multiplier les expulsions… il ne restera plus que Zemmour en France à ce rythme-là !

Nouvelle pause publicitaire (pour une fois la pub est salutaire). On nous annonce déjà une réaction à des propos de Léa Salamé concernant les meurtres de Mohammed Merah. On n’a pas hâte.

Retour sur le plateau. À nouveau, ça discute présidentiabilité. Zemmour, qui n’est pas candidat, pense qu’il va gagner. Puis on nous passe l’ancien roi du Maroc se prononçant contre l’immigration et l’intégration des marocains en France. Zemmour l’adore, un type « admirable, plein de finesse ». Attention, ne parlez plus d’intégration, mais de « françisation ». Puis voilà le couplet des anciens immigrés du maghreb qui elleux étaient des bons, alors que leurs enfants préfèrent la charia… Il veut donc revenir à la « loi de 1803 de Napoléon », c’est-à-dire pour l’obligation de donner des prénoms « français » à ses enfants. On reprend alors des exemples de bons immigrés, des italiens, on cite Platini, que ses parents (enfin son père!) ont appelé Michel. Pour Zemmour, les immigrés doivent se soumettre à la culture française dans toutes ses dimensions. Il faut fabriquer des français, Zinédine Zidane devrait s’appeler Michel ou Marc Zidane, mais cela ne s’est pas fait car les autorités françaises n’ont pas été à la hauteur…

Nous voilà au moment sur Merah. En fait, c’est surprenant, Zemmour ne voulait pas taper sur les musulmans mais sur les juifs. Il reproche alors aux familles des victimes de l’attentat antisémite d’avoir voulu faire enterrer leurs enfants en Israël. Preuve supplémentaire de l’émiettement de la France selon lui. Et le parallèle avec le point d’après rend le tout cohérent. En défense de la France de Vichy, Zemmour explique qu’il s’agit d’une justice politique qui a fait le procès de la France. Le candidat fasciste défend les policiers qui ont arrêté les juifs. Sans dire qu’il est pour, il comprend qu’ils aient obéi. Cet homme est vraiment abject. L’héritier de Maurras disait Praud en début d’émission. Oui, héritier de la collaboration et de l’OAS aussi.

Conclusion de l’émission : on nous ressort un document télé revenant sur les positions du RPR et de l’UDF, avec Sarkozy et Madelin à la manœuvre. Immigration zéro, préférence nationale, islam incompatible avec la république… Les positions de la droite « classique » sont celles du FN, et Zemmour de dire, tranquille, je ne suis pas d’extrême-droite, mais de droite, et de façon classique. La boucle est bouclée, Zemmour le sulfureux est en fait très fréquentable. Un plateau tranquille, entre racisme et sexisme, entre mensonges et délires, Zemmour finit par se comparer à Alexandre Le Grand et au Général de Gaulle, à Aristote même (la pensée au départ!), comme ça même les chevilles ne rentreront plus dans ses souliers. « Qui vous dit que je n’ai pas de destin ? », puis de citer Napoléon : « Je crois en moi et j’espère en dieu ». Amen.

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