Mais qui sont les écologistes à Poitiers (et ailleurs) ?

Petite brève, sous forme de (re)mise en débats d’une question centrale dans la situation sociale et politique que nous connaissons : mais qui sont les écologistes ? 

Alors qu’EELV vient de réaliser un bon score aux Européennes (moins bon si l’on prend en compte l’abstention, mais moins mauvais que les autres) nous sentons pointer pour les prochaines élections municipales l’enjeu suivant : « qui sont les VRAIS écologistes ? ». Cela d’autant plus qu’à Poitiers, Y. Jadot a obtenu environ 20% des voix exprimées. Un vivier électoral conséquent. 

Querelles de chapelles pour le monopole électoral de l’écologie 

Si EELV faisait des européennes et du vote EELV un vote « pour sauver le climat », du côté de la France Insoumise on n’hésitait pas à formuler des phrases comme « nous sommes l’écologie ». Au-delà des effets de communication, nous sommes ici face à une volonté, de la part des uns et des autres, d’avoir le monopole de l’écologie. Comme s’il était possible d’avoir la propriété d’une valeur, d’une idéologie, d’une science… 

Car si l’on écoute EELV, la FI ou encore Générations ne sont pas écologistes. Et si l’on écoute la FI, EELV n’est pas écologiste. 

Personne n’est écologiste, donc, circulez, y’a rien à voir ! 

Pas UNE mais DES écologies 

Si l’on souhaite réellement discuter sérieusement de l’écologie, il est plus prudent de respecter le droit de chacun de se revendiquer de l’écologie. EELV est évidemment une organisation écologique. Au même titre que la FI, que Générations ou que le NPA et nombre de militants libertaires et anarchistes. Ce qui fait la différence entre ces organisations ne se situe pas sur la sensibilité écologiste mais sur l’analyse de la crise écologique, l’analyse du système politique et surtout sur les réponses politiques à apporter et les méthodes pour mettre en place ces réponses politiques. 

Si EELV semble concilier capitalisme et écologie, avec comme objectif d’intégrer les majorités électorales (avec le PS, et En Marche, peut être), FI se pose plutôt en alternative électorale, et remet en cause, si ce n’est forcément la société capitaliste, ses excès via un anti-libéralisme économique revendiqué. 

En réalité, si dans le jeu électoral ces positions nous apparaissent comme totalement contradictoires, elles ne le sont pas tellement. Ni l’un, ni l’autre des programmes ne remet en cause le capitalisme. Ni l’un ni l’autre des programmes ne propose une rupture nette avec l’écologie « individualiste » pour aller vers un collectivisme écologiste (même si la FI le fait plus à travers l’idée de planification écologique nationalement. Mais a contrario le groupe « Osons Poitiers », au niveau local, soutenu par la FI, ne défend pas de mesures écologiques très différentes de « Poitiers collectif », soutenu par EELV. Du moins pour le moment).  

Unité dans les luttes, pour un écosocialisme assumé 

Aussi, la crise climatique est telle qu’il vaut mieux rassembler les forces souhaitant changer les choses que les diviser. La division électorale est un chose, mais le pire serait une division dans la lutte, dans les rues. Car c’est par ces mobilisations que peuvent naître les espoirs de changements et de nouvelles générations politisées.

C’est pourquoi il n’y a pas une mais des écologies. Ce pluralisme doit vivre. Les différences entre ces « écologismes » sont parfois fortes et non conciliables. Nous pensons au NPA, dans la logique écosocialiste que nous défendons, qu’aucune écologie digne de ce nom n’est possible dans le cadre d’une économie capitaliste et productiviste. C’est pourquoi nous sommes très critiques de la politique de EELV qui dilue/perd ses idéaux écologistes dans des compromissions électorales. Mais ils n’en demeurent pas moins écologistes.

L’écologie ne peut simplement pas être LA colonne vertébrale à elle seule d’un projet politique. On ne peut pas rassembler politiquement des ZADistes et François De Rugy. Il y a une écologie de droite, capitaliste. Une écologie libérale. Une écologie étatique. Une écologie anticapitaliste. Et même de l’éco-féminisme. Et même de l’éco-communisme. Bref, les clivages politiques ne sont pas réellement modifiés comme cela semble être à la mode. Asselineau et Dupont-Aignan souhaitent affirmer le clivage « souverainistes vs mondialistes », alors qu’il y a des internationalistes anticapitalistes et des mondialistes néo-libéraux qui sont en parfaite opposition sur tout. D’autres pensent qu’il y a un clivage « écologistes vs les autres ». Ces clivages n’ont pas de sens si la question sociale et démocratique n’est pas prise en compte. 

En réalité, le clivage politique le plus important aujourd’hui pour les écologistes est le suivant, et les élections municipales devront faire vivre ce débat à Poitiers : quelle écologie voulons-nous? Pour notre part, une écologie sans remise en cause frontale du système politique dans lequel nous vivons n’aura pas d’intérêt. La situation est urgente, il faut agir radicalement et vite. Nous défendons notre vision de l’écologie, car nous sommes anticapitalistes et écologistes. Écologistes car anticapitalistes. Ni les seuls, ni les vrais. Mais nous avons le courage de penser que nous n’en sommes pas de faux non-plus. Et que notre voix mérite elle aussi d’être entendue. A bon entendeur.  

Alexandre Raguet

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